Carine

Publié le par Janick Lebon

 

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Carine

 

Photo : En compagnie de mon fils Stéphane, j’aide ma petite Carine à se déplacer dans sa voiture.

 

J’ai quitté le croiseur « Colbert » après trois ans passés à son bord pour les escorteurs d’escadre le « Casabianca », puis le « Guépratte ». Ensuite, ce fut un passage à l’Ecole des mécaniciens de Saint-Mandrier à Toulon, puis à la base aéro-navale de Nîmes Garon et enfin au bataillon des Marins pompiers de Marseille. J’étais gestionnaire du matériel des marins pompiers, avec trois matelots sous mes ordres. J’avais affaire à de hauts placés, à commencer par le commandant de ce corps. Mais c’est à ce moment-là que le malheur a commencé…

            Eliane et moi habitions Marseille, plus précisément à Mazargue. Nous avions à cette époque deux enfants : Stéphane et Carine. Un jour Carine est tombée de sa chaise ; sur le coup, pour nous ce n’était rien, mais quelques jours plus tard nous avions constaté que l’enfant n’arrivait plus à garder son repas, qu’elle vomissait tout le temps. Le pédiatre consulté a demandé un électro-encéphalogramme ; et les résultats nous ont amenés à conduire Carine à l’Hôpital pour enfants. Le professeur qui la suivait lui a fait un scanner, un appareil moderne, le premier de France à l’époque qui a été attribué à l’Hôpital de La Timone. Notre petite fille a été vraisemblablement la première à tester de genre de matériel. Résultat de cette exploration : le professeur nous a informés qu’il avait décelé un cancer au niveau du cervelet, un medullo-blasthum, un cancer rare chez un nourrisson.

            Comme je connaissais les médecins des marins pompiers car ils avaient souvent affaire à moi pour le matériel, ils allaient presque tous les jours rendre visite à Carine et se renseigner sur son état de santé. Donc, j’étais au courant de tout ce qui la concernait. De tout ce que je savais, et de ce que j’avais appris, j’avais décidé de ne pas toucher le moindre mot à Eliane. Même aujourd’hui, elle ne sait pas grand-chose à ce propos ; elle en saura plus en lisant ce texte, après tant d’années. Notre enfant aurait eu trente deux ans aujourd’hui.

            Carine a été opérée et l’opération n’a pas réussi. On lui avait mis un drain pour que le liquide rachidien puisse s’écouler du cervelet et ainsi diminuer la pression dans boîte crânienne compte tenu de la tumeur qui grossissait de plus en plus, au point d’écarter les os du crâne. Le médecin des marins pompiers est même entré dans les détails pour m’expliquer ce qui s’était passé : le drain qu’on avait mis sur le côté droit de sa tête s’était bouché, et il a fallu une autre opération pour qu’on puisse lui en poser un autre, mais sur le côté gauche cette fois. Et pendant ce temps les parents attendaient…avec une angoisse grandissante.

            Nous allions la voir souvent, mais à travers une vitre. La veille de sa mort, j’étais déjà au courant de ce qui allait se passer. Le médecin qui est allé la voir ce jour-là m’avait dit : Janick, il n’y a plus d’espoir ; l’électro-encéphalogramme est plat ; il ne lui reste que quelques heures à vivre. Vendredi matin, vers les 10 heures, un coup de téléphone de mon collègue médecin m’apprenait la mort de mon enfant. Eliane n’en était pas encore informée. Ma belle sœur me téléphona aussi pour m’annoncer la nouvelle. Elle est morte la veille de son anniversaire, elle allait avoir un an.

            Je suis rentré à la maison le plus vite que j’ai pu. Eliane était effondrée. Je ne sais plus exactement comment j’ai traversé ces moments difficiles. La vie a continué et le temps a passé. Pour mon compte j’ai fait une dépression larvée, et je ne me suis pas fait soigner. Je comptais sur mes collègues médecins pour me ravitailler en médicaments. Quelques pleurs ! Carine n’est pas morte directement de son cancer, mais d’une méningite virulente post-opératoire. Je remercie ici les marins pompiers de Marseille qui ont fait une haie à l’entrée et à la sortie du cercueil de l’église pour témoigner de leurs sentiments de tristesse et de respect à l’occasion du drame qui a frappé la famille de l’un des leurs.

 

 

Publié dans Livre

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F
salut pa !!!<br /> je suis content de mieux connaitre le plus dure moment de votre vie la mort de ma premiere soeur carine.<br /> je te remercie et continue ce livre il fait connaitre l'histoire de notre famille.<br /> je vous aime papa et maman cherie.<br /> bisous bisous bisous
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